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Quand il faut quitter Paris, même si la destination m’attire, il y a toujours un sentiment d’arrachement… Plus jeune, j’avais le sentiment que j’allais rater un événement inoubliable et qu’il risquait de se passer des choses fabuleuses dont je serais privée contre mon gré. L’idée des vacances était plaisante mais quelle tristesse que de quitter Paris. Aujourd’hui, j’ai beau partir et même vivre à plusieurs milliers de kilomètres je suis toujours dévastée quand vient l’heure du départ.

Comment emmener Paris avec soi ? Comment se sentir proche quand on est si loin… ? Comment rester une parisienne à Cotonou ? La réponse est aussi étrange que la question et elle tient en un mot : le Chocolat.

Et oui Paris tient dans une toute petite bouchée exquise et tellement raffinée, dans une petite boîte noire ou bleue ou beige, dans un graphisme dorée baroque ou sévère et noir, dans un fondant, un craquant, un suave, un épicé, un coulant, dans la sensation gourmande lors de l’ouverture de la boîte, dans le choix cornélien entre des parfums si tentants, dans le renoncement à tous lors de l’élection de l’un…

Dans un univers aussi palpitant soit il, le quotidien peut faire ressentir quelque monotonie… On s’imagine alors ailleurs, on rêve à d’autres terres, à d’autres histoires, à d’autres temps. C’est alors que cette petite bouchée entre en jeu et vous transporte. Mais pourquoi donc à Paris ? Le cacao est brésilien, vénézuélien ou bien encore kenyan, les ganaches plus lointaines encore, les épices proviennent de destination de rêve, Vanille de Tahïti, Pistache de Téhéran, Poivre long de Jakarta… Alors peut être Paris, pour les retrouvailles de ces ingrédients magiques, pour le raffinement de ces écrins, pour cette sensation de luxe inimitable, pour la tradition gastronomique qui remonte aux temps les plus anciens. Peut être Paris aussi car on sait y apprécier ce genre d’enthousiasme. Les grands chocolatiers se donnent rendez vous dans la capitale comme si leur réputation en dépendait, comme si l’aboutissement était dans une de ces rues élégantes. Paris aussi permet d’en partir… Une réputation de grand chocolatier parisien permet d’aller diffuser ses gourmandises ailleurs dans le monde. Les portes s’ouvrent sur de nombreux continents lorsque vous êtes chocolatiers à Paris.

Aujourd’hui mon univers a été renversé par ce que Pierre Marcolini, son créateur, appelle de la Haute Chocolaterie. Inspirée de la Haute Joaillerie et de la Haute Couture, sa nouvelle collection de chocolats est unique et vous ferait oublier toute les autres.

Située au 89 rue de Seine, la boutique est très discrète, façade sobre, grande baie vitrée qui laisse entrevoir les vitrines intérieures, et une seule indication « Pierre Marcolini – Chocolatier ». Quand on entre dans ce temple du chocolat, la première impression est très chaleureuse, car il faut avouer que contrairement à une maison comme Ladurée, les vendeuses sont extrêmement sympathiques et ont l’air d’avoir une passion pour leur métier. Point ici de traitement à la chaine de clients lambda, non ! On prend le temps de vous écouter, de vous faire goûtez, d’affiner votre recherche. En bref on prend le temps du plaisir…

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La présentation est irrésistible. Les classiques d’abord : Cabosse grand cru aux fèves du Pérou, du Vénézuela et de Cuba ; Caraïbes rempli d’une ganache amère à la vanille de Madagascar ; Brésilien aux fèves de la région de Bahia ; Équateur aux fèves de Los Rios…

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Puis viennent les audacieux tels les chocolats Earl Grey, et thé au citron infusé dans de la bergamote, les balles de golf au caramel crémeux, praliné amandes et noix caramélisées, les cafés à la cardamome, les ganaches aux thym et oranges et les bouchées aux baies roses du Maroc si subtiles puis tellement intenses.

Que dire du palet, recouvert de feuille d’or qui se présente comme un bijou et qu’il faut manger d’un coup pour ne pas perdre une goutte du coulis de caramel outrageusement parfumé à la vanille ?

Viennent ensuite les chocolats fruités à la confiture de mangue du Brésil, au coulis de fleurs d’oranger, à la gelée fraiche de Cassis, à la framboise rafraîchie de zeste de citron…

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Et enfin différentes merveilles inclassables à la pâte d’amande (du niveau des Jolika de la Maison du Chocolat), au praliné noisette et dentelle de Quimper, aux quatre épices, à la nougatine ou encore au gianduja de chocolat au lait….

On pourrait imaginer que la créativité du Chef s’arrête là et ce serait une grossière erreur. Si la liste non exhaustive que je viens de faire est alléchante, les collections éphémères le sont tout autant.

L’événement de la saison marcolinienne se conserve au frigo ! Et oui, des chocolats qui doivent être servis entre 4° et 6° ! Incroyablement pop, ces petites billes colorées sont remplies de coulis de fruits et se servent presque glacées. La sensation est inattendue et nouvelle. Le chocolat, d’une finesse extrême renferme des concentrés de cassis, figue, citron, framboise, fruits de la passion et abricot, dans un esprit de sublimes confitures.

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On a envie de tout goûter et on ne peut s’empêcher de penser aux « Malheurs de Sophie » quand la petite fille découvre la boite de pâte de fruits et décide de goûter un tout petit morceaux de chacune pour que son forfait ne soit pas découvert… Ces Rainbow Drops feront mentir les statistiques qui prétendent qu’on ne mange pas de chocolats durant les grandes chaleurs. Fraîches et acidulées, rien n’est plus tentant que ces gourmandises estivales !

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Dans un genre radicalement différent, le Maître s’est essayé aux pralines alcoolisées à travers une collection de Whiskies et Rhums rares. Exercice complexe, réveillant de mauvais souvenirs de pralines vulgaires dans des papiers dorés. L’examen est passé avec brio. La recherche, qu’a nécessité l’élaboration de ces recettes, a porté le chocolatier vers six différents alcools choisis avec grand soin. La valse des whiskies s’ouvre avec un single malt de Speyside, l’Aberlour, intimement lié à une ganache Équateur et Ghana, enrobée de Cacao de Cuba. S’en suit un whisky d’Oban, marqué  par ses saveurs iodées et tourbées, accompagné d’un caramel salé et légèrement vanillé… Départ pour l’île d’Islay, où un praliné noisette du Piémont rencontre le meilleur whisky de la distillerie d’Ardbeg, le plus tourbé des Single Malts. Le dernier chocolat est le plus dépaysant, puisqu’il s’agit d’un métissage unique de fève mexicaine « Porcelana », ghanéenne et équateurienne (pas certaine que cet adjectif existe), avec un malt de la distillerie Yamazaki du pays du soleil levant ! Fondée en 1923, cette distillerie est l’un des plus ancienne au Japon et présente des alcools au caractère boisé et aux arômes floraux… Enfin les deux rhums ! Le premier vient des Trois Rivières au sud de la Martinique, le second de l’Ile Maurice, Chamarel, est relevé par un étonnant caramel à la purée de banane…

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Qu’en est il de la dégustation ? Pas réellement tentée, n’ayant aucune dilection pour les alcools forts, j’étais tout de même curieuse du résultat.  Souvent les grands maîtres vous emmènent avec talent vers des rives que vous ne pensiez pas aborder. Me voici donc dubitative mais ouverte à l’Ardbeg. Quel miracle ! Très peu sucré, le chocolat rassure immédiatement puis vient la sensation merveilleuse que l’on peut avoir en respirant un grand whisky, sans avoir la violence de ses quarante degrés. La tourbe se fait très vite sentir et une sorte de chaleur se dégage de cette microscopique bouchée. Nous sommes dans un mariage parfait, chacun des deux ingrédients magnifie l’autre, sans jamais prendre le pas. En fait, ce chocolat fait ressentir la plénitude qu’on peut lire sur le visage d’un grand dégustateur à la découverte d’un whisky inoubliable. Très tentée par la découverte des suivants, il faut néanmoins se restreindre car leur teneur en alcool est très forte et doit avoisiner les quarante cinq degrés. Cela rend ce petit moment de découverte exceptionnel et rare !

Ai je précisé que ce grand créateur est Belge ? Encore un ingrédient pour faire de lui le plus grand des chocolatiers parisiens !

Mes invités vont arrivés, le dîner est prêt dans le Golf du Bénin mais le dessert sera pris sur un air de Paris….

B.O. de dégustation de chocolats Marcolini

I love Paris par Ella Fitzgerald

Paris par Yael Naïm

Sous le ciel de Paris et À Paris par Yves Montand

Last tango in Paris par Gotan Project

Je connaissais pas Paris le matin par Grand Corps Malade

Paris par Marc Lavoine

Paris canaille par Léo Ferré

April in Paris par Charlie Parker

Paris… Demain matin… par Djako